jeudi 18 septembre 2014

Une journée, je suis partie....

Penser à nous, quand on a des enfants, c'est déjà difficile. Disons que si on a déjà été notre priorité, maintenant, les enfants passent plus souvent qu'autrement en premier!

Penser à nous, quand on a des enfants avec des besoins particuliers, qu'on ne sait pas trop à qui on peut vraiment les confier, c'est une autre histoire, et souvent, même si c'est important et qu'on en a vraiment besoin, on remet à plus tard...

J'ai remis à plus tard souvent, longtemps...  Quand les petits étaient bébés et que je les trouvais trop jeunes pour partir, ou même, quand je ne voulais pas laisser le papa seul avec quatre enfants qui demandaient tous beaucoup.

Une journée, ils ont grandit, j'ai commencé à pouvoir sortir, des petites périodes à la fois... et... quand on commence, on y prend goût. On réalise même qu'on recommence d'une certaine façon à vivre une vie qui était sur pause, sans vraiment qu'on en soit conscient.

Je ne veux pas généraliser. Certains parents ont cette capacité à se garder plus de temps pour eux, seuls, ou en couple... là où je trouvais ça difficile de le faire.

Il faut dire que dans notre cas, avec trois enfants en trois ans, et des évaluations qui n'en finissaient plus de finir, du temps pour nous, nous n'en n'avions pas.

Vint ensuite le casse-tête de les faire garder? Par qui?

Les enfants ont continuer de grandir, et, pour la première vraie fois depuis leur naissance, une journée, je suis partie.

En fait, une journée, nous sommes partis, moi et le papa, pour une fin de semaine complète. Loin de la maison, avec quatre mousses confiés à grand-maman.

La grande peut maintenant aider et est suffisamment autonome pour ne pas vraiment être une grosse charge pour la gardienne. Si Tommy est bien occupé, ça se passe assez bien aussi.  En dehors du fait qu'ils se lèvent tôt, ils s'occupent tous assez bien.

Mais, cette journée que je suis partie, je ne savais pas comment annoncer et expliquer mon départ aux garçons? Qu'est-ce que Tommy comprend réellement de cette notion du temps et de mes explications écrites sur un bout de papier que maman et papa sont partis et reviendront dimanche???? Lui ne peut me le dire et il ne peut non plus me faire un câlin de "amuses-toi bien maman ou je vais m'ennuyer de toi". En fait, il a juste lu les mots, et il est passé à autre chose aussi rapidement qu'il a lu le texte. Est-ce qu'il a vraiment compris? Mystère... seul lui le sait.

Et, en cette fin de journée où je devais partir pour de bon, je devais maintenant expliquer mon départ à mon petit bout de bientôt trois ans et demi? Mais quelles paroles puis-je vraiment utiliser? Maman s'en va, maman va revenir? Tit bébé s'accrochait plutôt à moi, ne voulant quitter mes bras, et moi, je ne pouvais qu'être impuissante de ne pouvoir le rassurer, lui expliquer, lui dire que je lui ramènerais une surprise, que je l'appellerais? Rien. Car il ne comprend pas encore...

C'est un peu tout ça qui retarde notre détachement, la petite corde qu'on étire pour reprendre un peu vie en dehors des enfants, car, ils ne comprennent pas comme les autres, ils ne vieillissent pas au même rythme, alors, tout est plus long, plus complexe, demande peut-être même un plus gros lâcher prise.

C'est ainsi que cette journée je suis partie. Un peu impuissante face à nos deux garçons, même si je savais très bien qu'ils ne s'ennuieraient pas et qu'ils étaient entre de bonnes mains... reste que de ne pouvoir utiliser les mots, ce n'est pas facile...


Et une journée... je suis revenue. J'ai passé le cadre de la porte, et mon petit bébé garçon m'a vu en disant "maman". Il ne m'a pas collé, ou bien il n'a pas pu me dire qu'il s'était ennuyé... ou peut-être pas. Il a pris ma main, poursuivant avec ses "maman", et il m'a amené jusqu'à l'armoire de la cuisine pour avoir un biscuit. Biscuit à la main, il est parti. Si, lors de mon départ, avec mes mots, je ne pouvais le préparer ou le rassurer, lors de mon retour, avec ses mots, il ne pouvait pas vraiment m'accueillir, et moi, je ne pouvais pas rattraper ces deux jours perdus avec des "comment ça été, est-ce que tu t'es amusé... etc..".  Il est parti.

De l'autre côté, personne n'a bronché. Tommy était à l'ordinateur comme si nous n'avions jamais quitté et les filles n'étaient pas intéressées par notre retour.

L'ennuie, n'est pas un concept clair, ce qui laisse souvent place à cette impression d'indifférence...


Le soir même, j'ai couché le petit. Comme d'habitude. Mais il a pleuré et il a pleuré longtemps malgré mes 3-4 retours dans la chambre pour le bercer. Encore une fois, je n'ai pu le consoler ni l'apaiser dans sa peine... celle qu'il ne pouvait même pas me dire de lui-même avec des mots. "j'ai peur que tu partes maman", ses pleurs étaient sa façon d'exprimer son inquiétude face à mon absence.

Deux semaines plus tard, c'est encore difficile, il ne s'est pas remis de cette journée que je suis partie, et mes mots ne peuvent toujours pas le rassurer. À tous les soirs, il me tient la main fort... et il pleure quand je quitte sa chambre.

C'est ainsi, qu'on aimerait bien, éventuellement, partir encore... mais que ça attendra, que le petit grandisse, que son inquiétude se replace, que sa confiance reprenne, qu'il ne pleure plus à chaque fois que je mets mes souliers et manteau, même si ce n'est que pour aller au dépanneur à côté de la maison. Car, comme mes mots ne peuvent l'apaiser, son inquiétude continue d'être la même, et seuls mes gestes, mes départs et mes retours rapides vont l'aider à reprendre confiance.

C'est ainsi que l'autisme influence nos vies, dans les petites choses, dans les petits gestes...


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