mardi 29 octobre 2013

La différence est une menace


La différence est une menace.

C'est simple, c'est vrai, mais non avoué.


Pourtant, je me souviens il y a plus de cinq ans lorsque je parlais de Tommy aux autres. Les parents "normaux", ceux avec des enfants dans les normes.

Je me souviens du silence blessant. Vraiment blessant. Mais j'ai osé tout de même, une journée, demandé pourquoi ce silence? 

On ne veut qu'être épaulé, réconforté, compris.

La différence, c'est menaçant.  Ce ne sont pas les mots qu'ils ont utilisés, mais je l'ai vite compris.

"J'ai peur.... je n'aime pas lire sur ce sujet, ça m'inquiète pour mes enfants"
"Je ne sais pas quoi répondre, j'ai peur d'être maladroit"

Il y a ceux qui malgré tout gardent le silence, ceux qui n'avoueront pas qu'ils s'en balance de cette différence et que leur petite vie à eux n'est pas plus facile.

Ceux-là ne disent rien, ou parfois des méchancetés.

Il y a bien pire que ça dans la vie!


La différence, c'est une menace.  Une menace réelle.

Accepter qu'un enfant bouge beaucoup parce qu'il a un trouble et non un problème d'éducation. Reconnaitre que tous les enfants ne sont pas mal élevés et tous les parents ne sont pas fautifs.

Mais le mien aussi il bouge beaucoup. Le tiens à pas l'air si pire.

Besoin de se réconforter sur la différence de l'autre, parce que si le parent d'enfant différent a le "droit" d'affirmer qu'il y a des défis, c'est menaçant pour le parent de l'enfant typique, d'affirmer que c'est vrai que parfois, il y a pire que soit.  Le notre, il va aller mieux en vieillissant. Il n'aura pas besoin de médication, juste d'être plus ferme.  Le sien, il va prendre des médicaments toute sa vie, il va peut-être vouloir mourir, être malheureux de sa différence.

Mais avouer tout ça, c'est menaçant parce que c'est accepter de reconnaitre la différence en soi. Elle existe, elle est réelle, bien là, elle ne s'en ira pas comme par miracle. Ce n'est pas seulement la faute du parent ni passager.  Alors là, on devra compatir, se regarder deux petites minutes pour réaliser que finalement, chez nous, ça ne se compare pas.

Est-on vraiment capable de le faire?

Certains oui, plusieurs, mais la différence est une menace pour beaucoup d'autres.


La différence est une menace. Elle est dérangeante, elle oblige des mesures adaptatives, elle se fait entendre et remarquer partout où elle passe. Elle coûte cher, elle est vue comme un boulet pour la société qui ne sait qu'en faire. Elle est vue comme une dépense inutile, pourquoi donnerions-nous des sous pour ces personnes différentes? Les parents n'ont qu'à les assumer, ce sont eux qui les ont mis au monde. Pas question de subir cette différence.

La différence est épuisante, elle mène des parents à la dépression, elle menace les emplois, elle force des congés trop souvent, elle dérange l'employeur.


La différence est une menace.  Parce que si on la reconnait, on devra alors reconnaitre le besoin pour les parents, pour les personnes différentes. Si on la reconnait, on devra alors compatir, adapter, aider...

Alors c'est plus facile, de seulement dire que cette différence n'existe pas. Qu'elle a été inventé, qu'elle n'est pas si pire, et que les parents n'ont qu'à mieux travailler, n'ont qu'à être meilleur dans leur rôle, n'ont qu'à cesser de s'absenter, n'ont qu'à assumer les frais qu'encourent leur enfant "pas différent"...

On s'en lave alors les mains.



Saviez-vous qu'il y a quelque temps déjà, trop longtemps, le gouvernement a annoncé une aide de 35 millions pour les personnes déficiente et autiste?

Saviez-vous qu'au même moment, le gouvernement fédéral a changé ses critères d'admissibilité aux allocations pour enfants handicapés et que le gouvernement provincial ne reconnait plus l'autisme comme un handicap. Les parents doivent de plus en plus se battre, seulement pour faire reconnaitre cette différence et obtenir un minimum ridicule et insuffisant d'aide financière pour leurs enfants.

Saviez-vous que les listes d'attente, l'accès aux services n'est pas plus rapide qu'il y a un an?

Saviez-vous que nous n'avons jamais vu la couleur de l'argent promis?

Saviez-vous que le programme d'aide financière mise en place, accessible au CLSC n'a pas été revu depuis plus de 15 ans (si je me souviens bien on parlait de 20 ans). Les parents reçoivent en moyenne 2,75$/heure pour se payer du répit spécialisé pour leur enfant. Service qui coûte en moyenne entre 12-15$/heure.

Blogger template 'Colorfull' by Ourblogtemplates.com 2008