lundi 22 novembre 2010

Je verserais des larmes

Je sais d'avance que ce message peut, pour certains, être difficile. Soit à comprendre, soit à lire. Je l'écris parce que je le trouve important malgré tout.

Il y a maintenant plus de deux ans que je suis officiellement entrée dans le monde de l'autisme. Deux ans que je le sais, mais finalement ça fait maintenant plus de quatre ans que j'y vis.

Je me souviens encore de ma réaction lorsqu'un médecin m'a enfin prise au sérieux concernant les difficultés de mon garçon et me pointait en direction du TED. J'ai souri. Un sourire pratiquement jusqu'aux oreilles.

Pour certains ça peut paraître anormal, même parfois je me pose la question. Sourire? Sourire d'apprendre que son enfant a peut-être un handicap qui le suivra toute sa vie. Pourtant à ce moment je ne pensais qu'au moment présent, et j'avais ENFIN des réponses concrètes à tout ce que je vivais avec mon garçon.

Lorsque je suis arrivée à la maison et que j'ai annoncé le tout à ma famille, mon conjoint, la réaction n'était évidemment pas aussi favorable. J'ai vu de la famille proche être triste, être angoissée, quel futur nous attendait, pourquoi nous? Mon conjoint a fait des recherches sur internet, il y lisait des récits sombres, tristes. Moi je cherchais des explications, témoignages et c'était en effet difficile, triste.

On aurait pu croire (et peut-être certains le croient encore) que j'étais en déni?  Une réaction si favorable à une annonce si désastreuse. Aucunes larmes, aucunes frustrations, je n'ai pas "maudit" le dieu, la nature ou peu importe ce en quoi vous croyez. Bref, pour plusieurs, c'est une question de temps non?

Des jours difficiles j'en ai vécu. Des jours où j'ai pleuré de fatigue aussi.

Des jours où j'ai pleuré sur le sort de mon garçon? Aucun. Des jours où j'ai pleuré sur mon sort? Non plus.


Vous le savez, mon blog je l'ai fait pour aider d'autres parents, pour laisser un témoignage et écrire ce que certains parents ont de la difficulté à exprimer en mots. Je le fais parce que je sais que ce n'est pas si simple pour tout le monde.

Il m'arrive régulièrement de faire un recul, sur ce qu'on a vécu avec les enfants, sur les défis de tous les jours, sur les particularités de mon garçon et mes cocottes bien spéciales.

Il m'arrive aussi de penser au futur.

Dans ces moments, j'ai le moton, la boule à la gorge, je verserais des larmes que je retiens parfois devant les gens avec qui je parle de mes enfants.

Les larmes que je verserais, celles que je retiens parfois devant vous à qui je parle de mes enfants, se sont des larmes de fierté. Fierté personnelle, de tout le travail accompli avec les enfants. Fierté de voir comment ses petits bouts travaillent forts, comment ils deviennent de petites personnes.

Quand je suis dans ces moments de réflexion j'essaie, vraiment, j'essaie de voir où je devrais en vouloir à dieu, la nature, ou autre. J'essaie de comprendre en quoi mon sort devrait être "grave" et personnellement je n'y arrive pas.

Mes enfants sont en santé. Ce sont des enfants qui débordent d'énergie, qui sont heureux, qui apportent tellement de joie dans mon foyer.

Je regarde dans ces moments mon garçon et là où ne devrais-je pas me sentir maudit, un peu comme mon conjoint il lui arrive parfois de se sentir, je me sens choyée. Je trouve que j'ai hérité d'un beau cadeau. Voir la vie différemment. Comprendre que tout n'est pas facile, ne plus avoir le même regard envers les parents d'enfants handicapés, ne plus penser que c'est absolument un drame. Je me sens choyée malgré tous les défis, de devoir élever un enfant comme mon garçon, parce que la vie n'a plus le même sens.

Bien entendu, parfois, quand on entend des parents d'enfants du même âge partager leur vécu qui semble plus simple, on voudrait se laisser tomber dans la déprime, chose qui dans mon cas ne dure qu'un petit moment une fois de temps en temps. Ce petit moment où je regarde et je me dis que j'ai une chance inouïe de pouvoir vivre la différence, et oui la difficulté qui vient avec, parce que ça permet de ne pas me sentir meilleure que les autres, ça me permet de penser à tous ces parents qui travaillent fort avec leurs enfants, sans nécessairement recevoir la  reconnaissance qu'ils méritent. Ça me permet, même si on vit tous différemment cette épreuve, de comprendre, d'avoir de la compassion pour tous les parents comme moi.

Vous pourriez me répondre que le futur pourrait me rattraper. Croyez-le je suis très consciente des difficultés que le futur va nous apporter et on les vit au jour le jour, on les traverse, gardant la tête haute. Il nous arrive même régulièrement de s'imaginer le futur on ne peut la plupart du temps, s'empêcher de rire. Imaginez notre garçon, grand de 6 pieds, tournant sur lui-même en se faisant aller les bras. L'imaginer au volant d'une voiture pourquoi pas? Pourquoi être triste sur un futur qu'on ne connait pas de toute façon? Le principal restera toujours le bonheur de mon enfant, peu importe qu'il soit autonome un jour, peu importe qu'il se fasse remarquer en public par sa différence. Je serai heureuse si mon enfant est heureux.

Des larmes, j'en verserais, et j'en verserai. Parce que pour moi, la vie m'a choyée et m'a offert malgré tout un très beau cadeau.

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