mercredi 7 mai 2014

Difficile de ne pas comparer...

J'ai déjà abordé ce sujet il y a un certain temps. Je ne me souviens plus par contre quand alors je ne peux pas mettre le lien ici... Je ne me souviens même plus du titre.

Il serait faux d'écrire et de faire croire que je suis une fille forte... Genre, tsé, le modèle là. La superwoman, qui passe par-dessus tout...  Ces temps-ci, je l'avoue, le trois ans me rentre dedans. Pas d'une façon à me rouler en boule dans un coin, mais plus un petit nuage qui est là... Je vois le temps passer, et si j'ai déjà eu, à cet âge-même, bien de l'espoir, bien des joies de progrès qui s'accumulent, bien de la naïveté à croire que ce n'était pas si pire... Là, disons que je suis ancrée dans la réalité à 100%.

Lorsque j'avais abordé le sujet de la comparaison, c'était pour parler de cette phrase qu'on entend.

"Il ne faut pas comparer!"

Non, c'est vrai, mais j'avais apporté l'explication qu'avec un enfant différent, partout où on va, qu'on le veuille ou non, la comparaison se fait malgré nous. En fait, on ne compare pas, mais on constate, tout simplement, parfois plus durement.

Lorsque nous avons un enfant différent dont la différence transparait dans toutes les activités du quotidien, on ne peut faire autrement que faire face à cette comparaison.

Un exemple banal. Je vais au restaurant avec la famille du papa. À cette sortie, il y a un petit garçon dont la date d'anniversaire est à peine un mois de différence avec Tommy. Alors, lors de cette sortie, on fait face à ce petit garçon qui nous montre un peu "c'est quoi un enfant de presque 8 ans". Un peu ce qu'on ne vit pas avec Tommy et la différence saute en pleine face.

Bon, mon exemple n'est pas pour dire que c'est difficile car la différence de Tommy ça fait des années que nous vivons avec, alors je ne compare pas, je ne constate même pas. Il est comme ça, c'est tout. D'ailleurs, si l'autisme plus sévère est un deuil, je crois parfois qu'il s'accepte mieux que les parents qui ont un enfant autiste plus fonctionnel, de haut-niveau, qui parait "comme les autres", alors la différence, par moments, elle se cache, et là, c'est vrai qu'elle saute en pleine face des parents qui revivent un deuil constant... différemment.

C'est un peu de cette comparaison que je veux parler. Car, si c'est inévitable de comparer lorsqu'on a un enfant différent, qu'on constate dans le quotidien, qu'on compare avec son grand frère ou sa petite soeur qui est "normal"...  La comparaison "entre autistes" est aussi présente. Différente, mais bien là.

Le mien a des rigidités alimentaires sévères.
Lui a des troubles de comportements graves.

Donc, on fait face, de un, à la différence de notre enfant versus les enfants "normaux", et de l'autre côté à cette différence entre les autistes.

"Mon fils autiste est souriant, me regarde dans les yeux et est colleux. Quand je compare à ce que "vous" (autres parents d'enfants différents) écrivez sur vos enfants, je ne reconnais pas mon fils."

De l'autre côté, la maman de l'enfant non-verbal qui n'est toujours pas propre à 14 ans ne peut faire autrement que de vivre une certaine comparaison avec les parents dont les enfants sont verbaux.

On ne s'en sort juste pas... même entre nous. Nos enfants sont tellement différents.

Alors, où je veux en venir avec mon petit coeur un peu tristounet des trois ans du bébé?

Comment ne pas comparer, lorsqu'à la maison on a trois autres modèles tous différents les uns des autres, et que parfois, les gens se demandent à qui le bébé ressemble. Un peu pour savoir à quoi s'attendre. Comme Tommy? Comme ses soeurs? Ou pas du tout.

C'est évident, que le comparatif que je ressors le plus pour moi, c'est Tommy. Car Tommy, c'est un autiste, un vrai, pour toujours. Flapping, alignement, inconscience du danger, etc.. etc..  Bon je n'ai pas envie de décrire Tommy qui ne change pas vraiment depuis quelques années. Alors, parfois, j'ai envie, même si je m'en souviens, de "comparer" mon petit bébé avec le développement de Tommy sensiblement au même âge.

Pourquoi? Parce que je ne sais pas ce que l'avenir nous réserve. Peut-être pour savoir un peu ce qui nous attends dans les mois à venir, même si je sais au fond que je ne l'apprendrai pas de cette façon. Pour voir aussi, nous étions rendu où avec Tommy au même âge. Je n'ai pas besoin vraiment de relire, je le sais dans ma tête, je me souviens...

Je me souviens de Tommy inconscient de son anniversaire lorsqu'il a eu trois ans, alors qu'il ne mangeait même pas son gâteau et ne savait pas souffler ses bougies.

Je sais, que le bébé n'a aucune conscience de sa fête à venir, mais il mangera avec appétit son gâteau et essaiera fort probablement de souffler ses bougies.

Je me souviens de Tommy qui aimait beaucoup apprendre. Casse-tête, dessins, lettres magnétiques. Petit garçon qui apprenait des chorégraphies de chansons par coeur, chantait, savait compter, connaissait l'alphabet et bien plus... C'était difficile et simple à la fois de l'intéresser un instant à quelque chose de nouveau qui était de son intérêt. Il alignait ses blocs, faisait un casse-tête de train, jouait avec ses blocs de lettre. Malgré le temps qu'il passait à tourner en chantant à tue-tête, il y avait ses moments où ça allait bien.

Le bébé est totalement différent de Tommy et c'est là où la comparaison parfois blesse. Il est difficile à faire coopérer. À intéresser. Il aime ses autos et quelques petits trucs de plus, mais oublions les casse-têtes, les blocs, les lettres, les couleurs, les chiffres. Nada. Rien. Mais bien entendu dans cette manie de comparer, je sais que des enfants de son âge n'aime pas tous dessiner ou faire des casse-tête et ne savent pas encore compter.  Mais quand même, pour le moment, ça ne fonctionne pas. Les enseignements qui étaient si facile avec Tommy sont ardus avec le bébé.

Qu'est-ce que ça signifie? Là est le mystère. Le bébé est mon meilleur. Mon plus fort au niveau de la recherche d'attention, le "mamaaaaaaan" insistant pour que je regarde l'avion qu'il a vu dans le ciel, ou une auto qu'il a retrouvé, même avec la tape sur la jambe si je ne l'ai pas entendu. Ces choses que les autres enfants ont dû apprendre. C'est mon premier qui est capable de me suivre au magasin, ou lors d'une promenade. Même s'il se ramasse parfois au milieu de la rue, il s'en sort très bien! Je n'ai pas peur de le perdre, il vient me voir s'il veut aller plus loin (évidemment, avec exceptions).

Mais, de l'autre côté, là où la minie avait débloqué soudainement, ce n'est pas le cas pour le bébé. Ses retards sont bien là, bien persistants, son intérêt est limité, ses intérêts restreints et obsessifs sont bien présents. C'est difficile par le fait même de ne pas le comparer à son frère. Si semblables, et si différents à la fois. Un enfant qui de son côté est tellement envahi par l'autisme qu'il ne s'intéresse que très peu aux gens et ne parle qu'au besoin. Et de l'autre côté, un petit bonhomme qui adore les gens, fait bye bye aux voitures, les aime tellement qu'il leur donne des bisous parfois en promenade, qui me demande constamment de l'attention, qui aime partager ce qu'il voit avec moi, demande à ce qu'on s'asseoit avec lui, tiens absolument à être dans mes bras en sortie, et a toujours quelque chose à dire même si je ne comprends pas le 7/8 de ce qu'il raconte. S'il y a bien une chose, c'est qu'il est connecté à fond à son entourage.... et pourtant....

C'est difficile de constater tout de même que malgré la différence avec son frère, il y a autant de travail qui semble nous attendre. Par le fait même, c'est difficile, là où à l'époque l'espoir était présente, la joie des progrès qui arrivaient sans cesse, de ne pas être maintenant connecté à une réalité bien plus complexe. Celle de savoir que tout est incertain. Que même si Tommy démontrait à l'époque des forces exceptionnelles, impressionnant même l'éducatrice qui l'avait à sa charge à l'époque, qu'il est resté bien ancré dans son autisme, que le coffre est resté barré, que son ouverture au monde n'a que très peu changée, qu'il ne parle pas vraiment plus depuis quelques années...  Alors, quand je vois son petit frère de trois ans, que je me souviens de Tommy, des forces, des espoirs... aujourd'hui, je sais que rien n'est acquis, ce qui rend un peu ce passage des trois ans plus difficile.


Tommy à trois ans, et le bébé!









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