mardi 26 mars 2013

Les mots justes...

Je ne crois pas qu'il y ait de mots justes pour m'exprimer. Peu importe comment, ni quand. Seul le temps nous le dira.

Mon entrée dans le monde de l'autisme s'est fait il y a maintenant plus de quatre ans et demi, bientôt cinq, et ce, malgré les huit ans de la plus grande.

Parce qu'avant, c'était normal, tout simplement.

C'est lorsque l'hypothèse du trouble se pointe le bout du nez qu'on apprend vraiment à vivre avec et qu'on le réalise réellement. Avant ça, c'est rien, c'est pas grave, ça va passer. Une journée, nos enfants sont comme les autres et le lendemain nous sommes propulsés sur une autre planète.

Pour Tommy c'était nouveau, c'était simple, c'était facile d'en parler.

Pour les autres, un après l'autre, c'est différent, et c'est plus difficile, d'une fois à l'autre. Peut-être parce qu'il y a une impression d'irréel dans tout ça. Que nous ressentons mais aussi que les gens nous font sentir au fil des ans.

"Ça ne se peut pas",
"ben voyons dont",
"les autres sont correct hein",
"ça parait pas"
"il a rien cet enfant là"
"ben voyons plus qu'un enfant dans la même famille c'est impossible"
"C'est très subtil"

Au fil des ans je me suis battue, je me suis requestionnée sur la bonne raison de le faire, est-ce justifié, les autres ont-ils  raisons... Que de questions m'ont traversée l'esprit mois après mois, avec peu de répit.


Il y a eu Tommy. Et il y a eu les autres.

Les autres, c'est comme notre petit secret bien gardé. Parce que ça ne sert à rien de se battre avec les gens, d'inquiéter les autres, d'expliquer sans cesse au  risque de sa propre santé mentale.

Tommy est autiste. Et les autres... "au moins, vos autres enfants sont corrects".

Et c'est bien comme ça, parce que les filles n'ont pas besoin d'être publiquement étiquetté. On s'en tient à la famille proche, papa, maman, grands-parents. Parfois, les gens posent une question et la réponse est vague, mais les commentaires eux sont toujours aussi blessants, aussi rassurants se voulaient-t-ils au départ.

"Voyons, elle est parfaite cette enfant"
"Elle est très intelligente"


Aujourd'hui, puis-je vraiment trouver les mots justes? Je ne le crois pas vraiment et je n'osais même pas.

Hier, j'aurais pu vous écrire un long message sur notre petit voyage de la journée pour l'évaluation du petit dernier qui aura bientôt 23 mois. Je ne l'ai pas fait parce que je ne me sentais pas à l'aise d'écrire ces mots. Pas pour moi, pas parce que je n'accepte pas, mais peut-être parce que je sais seulement qu'on ne sait pas ce que le futur nous réserve, et qu'à cet âge, je trouve que ces mots peuvent paraitre lourds, mais aussi être requestionnés, commentés, sans arrêt.

Hier, nous sommes allés, pour faire évaluer le petit dernier. Dans son cas, il ne manquait que deux tests pour compléter le portrait que j'ai tracé au fil des mois et des différents intervenants.

Hier, nous avons aussi, fait voir la petite minie, celle qui est "parfaite" aux yeux des autres! Qui n'a rien.

Je me questionne, en quoi l'étiquette serait-t-elle un signe d'imperfection? Les gens voient trop souvent une lourdeur inutile à cette étiquette. Tous ceux qui la porte devrait être comme Tommy.


C'est un petit bébé qui était égal à lui-même qui a fait son entrée hier à la clinique, rencontrant une psychoéducatrice et une psychologue.

Son premier réflexe, petit homme fort qu'il est, a été d'aller voir un jeu à la table, et quand l'éducatrice l'a approché, il lui a "parlé" dans sa langue, lui montrant clairement le jouet qu'il regardait.

Pourtant ce petit homme fort a de réel difficulté au niveau des apprentissages, du développement social et du langage. Il ne parle toujours pas, même s'il essaie vraiment beaucoup. Il s'intéresse aux autres, mais à sa façon... et quand bon lui semble. Il apprend et il perd...

C'est un ADOS bien représentatif de ce qu'il est qu'il a fait. Qui ne m'a rien appris, mais je l'ai vu dans un nouveau contexte.

J'y ai vu un petit garçon "sourd", parce qu'il ne se retourne toujours pas à son prénom malgré de nombreuses tentatives. 

J'y ai vu un garçon intéressé, mais pas tant que ca. Focussé sur les petites autos refusant tout contact social qu'il soit, s'enfermant dans son monde.

J'y ai vu un garçon qui lorsque les autos ont disparues, ne savait plus trop. Mais il a quand même exploré l'environnement, mais le contact social lui, non merci!  Les jouets ne semblait pas l'intéresser, mais aussitot que l'éducatrice avait le dos tourné, il se précipitait dessus!


Pourtant, un enfant peut bien être gêné non? Et c'est l'interprétation principale que les gens en font. Il est gêné, ça ne lui tente pas. Tout comme les petits de deux ans de mes amis.

Mais les petits amis de deux ans, tout autant gêné qu'ils sont, se cachent, à leur façon. Dans les jambes de leur mère ou collé sur un mur à essayer de se fondre dedans, tout en vous regardant droit dans les yeux ou parfois en se cachant le visage.

Bébé n'était pas gêné. Il était simplement lui-même, à quoi peuvent bien servir ces gens qui sont avec moi? Sauf lorsque j'ai vraiment un besoin.

Il sait demander, à sa façon, dans le quotidien, mais ce n'est toujours pas bien généralisé dans tous les contextes ce qui fait qu'il peut abandonner facilement, n'insiste pas. Pourtant, on le sait, c'est évident qu'il veut quelque chose.


C'est évident, ce l'était déjà, ce le fut durant la rencontre et ce l'est encore aujourd'hui.

Il n'y a pas de mots justes pour exprimer quelque chose qui me semble évident, mais tout incertain à la fois.

Il n'y a pas les mots pour exprimer l'émotion, qui se vit par en-dedans, ni une tristesse, ni une joie... simplement, une réalité, une évidence. Même pas un soulagement, parce qu'il n'y avait pas vraiment de poids, pas comme les autres. C'est juste "comme ça". Ça l'a toujours été dans le fond, parce que contrairement aux autres, je le sais... depuis toujours. 

Pourtant, ces mots, je ne les prononce pas. Parce qu'il est petit, parce qu'il a le droit, comme les autres, à son petit moment "il est comme ça" et non "il est autiste". Parce que l'étiquette dans le fond, pour moi, elle ne veut plus absolument rien dire.


Pourtant, ces mots, devront éventuellement sortir de ma bouche, pour expliquer... avec toute la lourdeur que le mot "Autisme" signifie aux oreilles des gens.

Moi, c'est mon petit monde, ma petite gang... comme ça, tout simplement. Le futur ne sera certes pas simple, pas plus que le passé ne le fut, mais le bonheur, c'est ce qui comble une famille... et chez nous, on respire le bonheur!





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