mercredi 2 février 2011

Enseigner ce qui ne s'enseigne habituellement pas

C'est le défi auquel font face les intervenants divers avec les enfants handicapés. Je parle ici plus de la partie neurologique mais je sais que c'est semblable pour les handicapés physiques.

L'enfant apprend à parler seul. Il apprend par imitation, observation de son environnement et désir de communiquer.

L'orthophoniste doit apprendre à l'enfant à parler. Il y a les cas de dyspraxie. On doit enseigner à l'enfant les mouvements oraux,faciaux. Comment placer sa bouche, la langue pour faire le son désirer. Enseigner pour les cas sévères chaque sons un après l'autre encore et encore. On doit enseigner à des enfants dysphasiques à organiser l'information dans sa tête, à comprendre des concepts qui se font naturellement chez les enfants. On doit lui enseigner à placer son information, les mots adéquatements afin de former une phrase. On doit enseigner à un enfant comme Tommy la base même de la communication, commençant par l'intérêt, l'utilité de l'interraction et du langage.

L'enfant apprend à marcher seul. Il apprend par imitation, par désir d'autonomie, par désir d'aller plus vite! Il apprend à sauter, faire des pirouettes.

Les ergothérapeutes, physio travaillent à enseigner ces mêmes choses aux enfants tout dépendant de la cause du handicap.

Le bébé apprend à manipuler la cuillère.
Le bébé apprend à recracher ce qu'il n'aime pas.

L'enfant apprend à manipuler de la pâte à modeler. L'écraser, la rouler, faire des boules.
L'enfant apprend à boire dans une paille.
L'enfant apprend à se moucher.

L'enfant apprend à attirer l'attention de la personne à qui il veut parler.
L'enfant apprend à pointer.

L'enfant apprend à dire MOI, TOI, JE, TU, IL.

L'enfant apprend à dire qu'il ne veut pas, qu'il a besoin d'aide, qu'il est capable, qu'il ne sait pas.

L'enfant apprend à dessiner, s'habiller, attacher son manteau, ses boutons.


Quand on regarde la liste ci-haut ce sont tous des apprentissages qui se font généralement d'eux-même, à un âge à peu près semblable chez tous les enfants.

Des spécialistes ont étudié tout ça, fait des chartes, des moyennes mais habituellement ce sont le genre d'apprentissage qui se font sans même qu'on le réalise vraiment. Les parents ne se cassent absolument pas la tête avec ça, pas plus que le bébé qui démontre un intérêt à manipuler la cuillère vers 12 mois.

On peut maudire les spécialistes d'avoir monté toutes ces chartes, ces moyens de comparaisons et de stress chez les nouveaux parents. Oui oui, c'est souvent ce qui arrive. Pourtant même si on les déteste, ces chartes ont été faites afin d'aider les spécialistes qui travaillent avec les enfants présentants différents retards. Que ce soit un retard causé par un handicap ou un retard qui se replacera avec les mois ou années sans laisser de trace dans le futur.

Vous êtes vous par contre penché sur la question du "comment enseigner ce qui ne s'enseigne habituellement pas" ?

Imaginez le casse-tête.

Apprendre à un enfant à pointer. On doit apprendre le geste, comment placer les doigts, on doit lui montrer qu'il doit pointer directement ce qu'il désirer, lui apprendre l'utilité du pointage.

Apprendre à un enfant à boire dans une paille. Placer sa bouche, comment placer sa langue, que l'enfant comprenne exactement ce qu'on attend de lui (si on pense à un enfant comme Tommy).

Apprendre à un enfant à se moucher. Comment souffler avec son nez.


Je fréquente et je vois des intervenants régulièrement et je ne peux m'empêcher d'être fascinée par tous les défis de leur travail. Je suis fascinée par le fait même de la complexité du cerveau, du corps humain et ainsi qu'à quel point les choses qui nous paraissent pourtant si simple peuvent être si compliquées.

Enseigner ce qui ne s'enseigne habituellement pas c'est loin d'être une tâche simple et c'est en voyant les intervenants à l'oeuvre qu'on le réalise vraiment.

Précisions

Vous savez, j'ai pensé à ce texte une partie de la mauvaise nuit qu'on vient de passer. Non non ce n'est pas le texte qui m'a empêché de dormir mais ça m'a tracassé.

Honnêtement je ne sais pas plus, après une nuit à moitié réveillée à y penser, comment écrire le texte.

Les écrits ont le gros défaut d'être une "communication" à sens unique, et de pouvoir être interprété de différentes façons selon le lecteur.

Je sais que ça se produit ici et je tente, lorsque c'est le cas de rectifier le tir du mieux que je peux. Il faut comprendre que quand j'écris je peux penser que le message est clair et finalement réaliser par les différents commentaires que ce n'est pas le cas.

Une connaissance m'a fait part de la réaction qu'à amener la publication de mon dernier message du blog. Une réaction d'incompréhension face au message et aussi un sentiment d'attaque, de reproche qui était loin d'être le but.

J'ai déjà dit, et je le répète encore, beaucoup des textes fait ici sont inspiré de mes lectures, mes discussions avec d'autres parents, des courriels que je reçois parfois de détresse ou de demande d'aide. Ces textes ne sont pas écrits principalement POUR moi, mais pour ces gens qui ont besoin de se sentir compris, pour l'entourage, familles et amis, et gens intéressés par le sujet.

Certaines personnes n'arrivent pas toujours a bien exprimer leur vécu lorsqu'ils en ont besoin. Certains parents sont dans la phase difficile de démarche vers un diagnostic, ou bien l'obtention du nouveau diagnostic qui oui amène un certain isolement.

Le texte n'était pas écrit pour reprocher à "tout le monde" d'être maladroit, de ne pas être assez "sympathique" ou compréhensif et il n'était pas écrit non plus pour reprocher aux gens de se foutre de nos "malheurs".

Le texte n'est pas écrit sous le coup d'une frustration quelconque, ni un reproche envers MA famille et mes proches.

Le texte explique le sentiment d'isolement qui vient avec la différence. DIFFÉRENCE. J'écris ce mot parce qu'il englobe plus de situations. Les parents qui ont perdus un bébé à la naissance, une personne avec un enfant gravement malade, un malade du cancer en phase terminale, les parents d'enfants handicapés, et encore là c'est différent selon le handicap physique, mental, neurologique etc...

Vous savez, j'en suis rendue à ces lignes, et je sais que malgré toute ma bonne volonté de mieux m'expliquer, il y sûrement encore place à interprétation et j'en suis désolé. Comme je dis l'écris ne remplace malheureusement pas une conversation directe.

Premièrement, le titre de mon message précédent était fait en fonction d'un sentiment très lourd que j'ai vécu durant mes démarches et le diagnostic de notre garçon, il y a plus de deux ans. C'est une phase qui est très difficile et oui même chez le parent le plus "fort", le plus renseigné. Je me souviens qu'au moment où on a obtenu le diagnostic et qu'on a fait l'annonce à la famille, comment je me suis sentie seule. Là où j'aurais eu personnellement besoin qu'on me demande "comment ça va" (titre de mon message) et qu'on me demande vraiment comment on vivait tout ça, j'ai plutôt vu de la tristesse dans le regard des gens et beaucoup trop d'évitement. Oui les gens ne savent pas si ils peuvent aborder le sujet, si c'est trop difficile, mais quand tu aimerais juste te confier un peu et que tu vois que cette nouvelle "différence" fait reculer les gens malgré eux, ça fait mal.  Oui c'est nécessaire de le dire et je ne crois pas être un extra-terrestre sur cette terre qui a été la seule à vivre cette phase.

Deuxièmement, pendant la phase diagnostic, il y a une certaine intolérance et ISOLEMENT qui s'installe. L'intolérance fait qu'on doit réapprendre, tranquillement, a accepter les malheurs des autres. Hé oui, la voisine qui se lève à toutes les nuits depuis 9 mois a le droit de se plaindre et de dire qu'elle est fatiguée. Oui elle a le droit de nous dire "je comprends comment ça doit être difficile", mais il se peut qu'à ce moment précis de notre cheminement on ne soit juste pas capable de l'accepter. Ça demande du temps, et comme je dis ce sont des choses que je vous explique pas seulement en fonction de MOI mais en fonction de ce que j'ai partagé avec d'autres parents et que j'ai constaté. La mère qui vient d'apprendre que son enfant est mourrant, vous croyez sur le coup du choc elle sera capable de vous entendre parler de votre mal de tête. Il se peut, à ce moment précis qu'elle ait envie de vous dire que vous vous plaignez le ventre plein. Par protection, et par besoin de travailler sur soi, beaucoup de parents s'isoleront pendant cette phase difficile.

Troisièmement, il y a des gens maladroits, que je pardonne sans problème, mais il y a des gens mal intentionnés. Ne croyez pas que parce que VOUS êtes empathique et compréhensif et supportant que c'est le cas de tous les gens  et oui malheureusement certaines personnes ressentent le besoin fréquent de diminuer notre peine, les difficultés de notre enfant. Après avoir obtenu le diagnostic de nos enfants si vous saviez le nombre de fois que nous entendons des "voyons, ya rien là, un trisomique c'est ben plus grave".  "ah ben il a l'air pas si pire"... que ce soit de famille proche ou bien d'étrangés. Parfois c'est fait maladroitement et on peut le reconnaitre et c'est facilement accepté. On le sait... la personne voulait être rassurante et bien faire, mais ce n'est pas toujours le cas. Certaines personnes sont malheureusement très mal entourés et c'est triste et oui je me permets de le mentionner pour eux.

Finalement, si on en revient au sujet de l'isolement, comme j'ai précisé ce n'est pas un reproche, je n'accuse pas la population d'isoler les gens dans la différence. Je parle d'un phénomène qui se produit malgré tous, malgré la bonne volonté de tous et chacuns.

Vous savez, quand vous allez à un souper entre amis, là je parlerai principalement de jeunes mamans ou même de futures mamans, même si vous ne vous confier pas sur vos bobos de tous les jours, vous appréciez cette chance de pouvoir discuter avec des gens qui vivent les mêmes choses que vous. Vos enfants qui sont au même âge, c'est toujours plus facile de discuter avec la maman dont le bébé a 9 mois et est en crise d'angoisse au même moment que vous, que de discuter avec celle qui l'a vécu il y a plus de 5 ans. Bien sûr que la maman de l'enfant de 5 ans peut vous apporter beaucoup, écoute et compréhension, mais rien ne remplace cette chance de jaser avec la maman du bébé du même âge, qui vit les mêmes sentiments au même moment que vous. C'est la même chose pour les futures mamans, ma première grossesse a été une grossesse à risque, assez pour avoir peur de ne pas mener le bébé a terme et même de le perdre. Lorsque la situation s'est confirmée j'ai laissé tombé l'idée des cours prénataux, parce qu'à ce moment précis(phase) j'aurais eu de la difficulté d'être entourée de futures mamans pour qui ça va bien. L'isolement dans cette situation précise se fait en tant que protection.

Comme je dis au début c'est difficile et plus le temps passe plus on recommence à être tolérant, hé oui les gens ont le droit de vivre des malheurs qui nous semble maintenant "de petits riens" et on recommence à pouvoir accepter de les entendre et compatir de façon tout ce qu'il y a de plus sincère. Mais ça demande du temps.

Les psychologues parlent du processus "d'acceptation"(je déteste ce mot) du diagnostic comme un deuil. Par contre, les différentes phases du deuil passent et reviennent. Les parents se promènent d'une étape à l'autre malgré eux et selon les épreuves du moment.  Donc même si je viens de vous expliquer que la phase du début est difficile et qu'on réapprend tranquillement, il se peut qu'un parent retombe après une grosse épreuve, une régression ou autre dans cette phase qui ramène l'isolement.

Je vous ai donc expliqué le souper, les rencontres entre amis, et à quel point c'est agréable de se retrouver avec des personnes qui vivent les mêmes choses. Si on vous amenait demain matin dans une rencontre de parents d'enfants handicapés, est-ce que vous seriez à l'aise de participer à la conversation? Les choses racontées par ces parents, même si vous êtes la personne la plus compréhensive qu'il y ait, vous ne les vivez pas. Il se peut par le fait même qu'à cette rencontre vous soyez à l'écoute, sincère, mais la participation vous sera difficile parce que votre vécu est différent. Hé bien c'est exactement ce que je tente d'expliquer et je ne vois pas le mal de dire que dans une rencontre de mamans d'enfants dit "normaux" un parent d'enfant handicapé se verra dans "l'obligation" de se taire. Personne ne l'a forcé. Personne ne lui a dit de ne pas le faire parce que ce n'était pas intéressant. Il se taira principalemen parce qu'il ne vit tout simplement pas les mêmes choses alors que voulez-vous qu'il rajoute à la conversation? Si vous avez le droit d'être mal à l'aise, en silence, à l'écoute, compréhensifs, empathiques à travers un groupe de parents handicapés, parce que leur discussion sur les dernières d'ergothérapie pour montrer à leur enfant à faire du vélo et qu'ils racontent à quel point c'est compliqué avec un enfant qui va regarder les nuages au lieu de regarder en avant, et auquel s'ajoute un retard sévère au niveau de la compréhension et du développement moteur, bien qu'intéressantes ne sont pas ce que vous vivez. Dites-moi ce qu'il y a de reprochables à expliquer que ces parents vivent la même chose lorsqu'ils sont entouré de parents d'enfants "normaux".

La différence c'est que la situation que je vous explique plus haut, vous qui êtes dans un groupe de parents d'enfants handicapés, c'est que cette situation ne se présentra que très rarement voir peut-être même jamais pour certains. La situation inverse, le parent ee l'enfant handicapé dans des réunions de familles, des sorties scolaires, de garderie, les cours à la piscine, le karaté, pour le parent de l'enfant handicapé cette situation se présente à TOUS les jours.

Ça n'a rien à voir avec la bonne volonté du parent de l'enfant handicapé plus que la bonne volonté du parent de l'enfant normal, c'est tout simplement une réalité quotidienne qui rend certaines sorties plus ou moins agréables, qui amène à des rencontres qu'on aimerait parfois éviter, des commentaires parfois blessants (volontaire ou non mais comme j'ai expliqué plus haut oui on sait faire la différence entre une personne qui a été maladroite et une personne qui le fait pour rabaisser ce qu'on dit).

Le partage que vous pouvez vous permettre, à double sens, l'interraction sociale, celle où vous parlez avec des gens qui vivent des choses semblables aux votres, c'est facile, vous les retrouver aux fameux cours de piscine, aux réunions de famille, aux sorties entre amis. Pour plusieurs d'entre nous (j'essaie d'éviter la généralisation) cette interraction nécessaire, celle où on voudrait parler avec des gens qui nous "comprennent" parce qu'on vit les mêmes choses, celle où on peut parler avec des gens qui comprennent les termes plus compliqués comme autostimulation, écholalie, qui peuvent dire "ah oui hier j'ai vécu un événement X semblable à ce que tu me racontes", elle doit être provoquée. On ne peut plus la retrouver dans la vie de tous les jours, dans nos sorties, dans nos rencontre familiales. On doit chercher, provoquer des rencontres avec des gens qui ont des enfants comme les notres et c'est plus compliqué, moins accessible.

Je disais que même le meilleur ami ne peut combler ce vide, parce que c'est réaliste, le meilleur ami peut très bien écouter, comprendre du mieux qu'il peut, rassurer, être empathique, mais il ne peut pas offrir ce manque. L'ami empathique ne vit pas le sentiment que je peux parfois vivre en tenant mon garçon dans les bras, réalisant qu'il grandit et que ce sera plus compliqué. (et croyez-moi ce n'est pas écrit par tristesse, déprime ou découragement, seulement parfois une constatation lorsqu'on gère une crise du petit de 40lbs, qui va continuer de grandir) J'ai beau avoir la famille et l'entourage le plus compréhensif du monde, de savoir qu'ils ne vivent pas ces émotions, oui parfois on se sent seul et on se dit qu'il  ne pourront jamais réellement comprendre.


Bon j'arrête ça là en m'excusant d'avance si j'ai oublié de préciser d'autres points qui n'étaient pas tout à fait clair.

Merci, si vous avez eu le courage de lire jusqu'au bout les explications ci-dessus!

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