jeudi 11 mars 2010

Saute... Saute... Saute...

Écouter tout d'abord ce petit vidéo.




Ce vidéo n'a rien de particulier n'est-ce pas? On y voit des enfants qui s'amusent avec leur nouveau cadeau de Noël et pourtant... Apprendre à sauter? Avez-vous eu besoin d'apprendre à sauter à votre enfant? Est-ce que suite à une rencontre en pédopsychiatrie on vous a dit que votre enfant a des problèmes de coordinations moteurs et que vous devez commencer à travailler avec lui pour lui enseigner un petit geste pourtant si banal et inné non?


C'est avec des enfants "différents" qu'on découvre à quel point de petits gestes "banals" ne le sont en fait, pas du tout!

Un parent d'enfant dyspraxique vous expliquera à quel point les activités quotidiennes demandent énormément de travail pour leur enfant. Lorsqu'on parle on ne réalise pas tout le travail qui se fait, c'est tout simplement naturel, sauf pour un enfant "différent". Un enfant atteint de dyspraxie doit penser au mot qu'il veut dire, penser à comment placer sa bouche pour faire le bon son, penser aux bons gestes, comme bouger sa mâchoire... etc..  

Vous pouvez lire un texte intéressant sur le sujet ici : http://dyspraxieauquotidien.blogspot.com/2009/03/la-dyspra-quoi.html


Un parent d'enfant "typique et tout ce qu'il y a de plus "normal"" pensera comprendre ce que nous pouvons vivre, mais non pas vraiment.

Un parent d'enfant turbulent pense comprendre ce que vit un parent d'hyperactif.

Un parent avec un enfant qui a un retard de langage pense comprendre ce que vit le parent d'enfant dysphasique.

Un parent d'enfant avec un trouble moteur pense comprendre ce que vit le parent d'enfant dyspraxique.

Un parent d'enfant un peu peureux pense comprendre le parent d'un enfant qui a des troubles sensoriels.



À quelque part, chaque parent d'enfant typique vit certaines situations que nous vivons à tous les jours avec nos enfants. Je le dis pour les fois où on m'a répondu "ta cousine aussi fait ça", "mon petit garçon aussi a peur des avions"... Oui tous les comportements, toutes les difficultés de nos enfants se retrouvent aussi dans les enfants "normaux"... mais pas avec les mêmes défis, pas avec la même intensité, ça ne nécessite pas le même travail et ça n'atteint pas le futur de l'enfant "normal".

Je ne dis pas ça pour diminuer les problèmes chez les enfants "normaux" parce que oui je sais qu'il y en a. Je le dis pour conscientiser les gens sur tout le travail et tous les défis qui attendent nos enfants et nous-mêmes en tant que parents d'enfants "différents".

Je connais des parents avec un enfant qui ne dort pas bien la nuit. Un parent avec un enfant difficile sur la nourriture. Un parent avec un enfant timide. Un parent avec un enfant qui a un retard de langage. Un parent avec un enfant turbulent. Un parent avec un enfant lunatique. Un parent avec un enfant "sauvage". Un parent avec un enfant un peu dans sa bulle. Un parent avec un enfant peureux.

Des parents avec tout ce qui est décrit plus haut dans un seul enfant? Peu.  Ne me dites pas que vous comprenez parce que vous avez un enfant difficile sur la nourriture. Oui vous comprenez... un seul aspect de l'ensemble des particularités de nos enfants. UN aspect. Un aspect que vous trouvez difficile alors imaginez avoir le lot.

On comprend la journée où tous nos gestes sont en fonction de l'aide et des "petites thérapies quotidiennes" qu'on peut offrir à notre enfant.
La journée où on achète un trempoline pour la thérapie qu'on va faire avec notre enfant et non pour le jeu tout simplement.  La journée où tous nos achats sont finalement basés sur ce qu'ils peuvent apporter pour aider notre enfant.

Un jeu de perle à enfiler pour travailler la coordination oeil-main et la motricité fine dans la "pince" qui n'est toujours pas acquise à 3 ans et demi.

Un trempoline pour gérer les excès d'énergie, le besoin de stimulation sensorielle, pour travailler la connaissance de son corps, ses limites, son équilibre. Pour apprendre à sauter.

Un jeu de mémoire pour apprendre à associer les "pareils" et travailler la compréhension des consignes simples comme donne, montre-moi, pointe.


On comprend lorsque les "méthodes traditionnelles" d'éducation ne fonctionnent pas. On comprend le jour où on trouve les réponses dans des formations sur les troubles de modulation sensorielles, sur des formations sur le ABA,ICI.

On comprend la journée où la maison est transformée en lieu de thérapie. Où les termes "un peu médicaux" prennent plus de sens que tout le reste. Ergo, ortho, pédopsy, ADOS, écholalie, autostimulation, stimulation vestibulaire, brushing, compression...

On comprend la journée où il nous vient parfois le découragement, la montagne qui est parfois un peu grosse... avec un enfant qui se lève et va tourner autour d'une table pour les 30 prochaines minutes sans même remarquer qu'il y a d'autres personnes autour de lui, ni même un bonjour maman! 

On comprend lorsqu'un repas demande une planification incroyable... en même temps qu'une gestion épuisante d'une enfant qui ne comprend pas du tout qu'elle doit rester assise et ne pas lancer sa nourriture par terre. Une petite qui passe beaucoup de temps à se cacher le visage à la vue de son repas tout en essayant de se sauver de sa chaise.

On comprend lorsque ce que j'ai décrit plus haut n'est qu'une très très petite partie d'une journée avec des enfants "différents" et non un petit événement isolé et passagé pour quelques semaines.


Un enfant différent nous fait vraiment voir la complexité de l'humain, le cerveau. Toutes ces choses acquises naturellement, qui ne le sont pas pour ces enfants. Toutes ces choses qu'on croyait anodines. 
Pour ces enfants, parler devient difficile, comprendre est difficile, s'organiser est compliquer, se faire des amis... dans quel but? Regarder dans les yeux? Horreur! C'est LE défi. Sauter est un apprentissage, gérer ses émotions l'est tout autant, gérer les rigidités et les obsessions. Vivre avec ses troubles sensoriels est un défi de tous les jours. Apprendre à manger "comme les autres" relève d'un travail de longue haleine. Comprendre les codes sociaux qui gèrent notre environnement... on y reviendra plus tard!

Pour tous ces parents qui "pensent" comprendre? Je dis seulement que vous avez encore beaucoup de chemin à faire... et que la sensibilisation est le mieux que nous pouvons faire pour vous enseigner un peu de notre monde... si vous êtes ouverts d'esprits et prêts à nous écouter.
Je vous invite à regarder :

http://mamanbooh.blogspot.com/2010/03/dyspraxie-videos-de-fillette.html


**Comme les écrits sont parfois mal perçus :

Notez que ce message n'est pas accusateur, je ne généralise rien dans mes écrits, je ne mets pas tout le monde dans le même paquet. Ce message n'est pas écrit de façon agressive ni sous le coup de la frustration.Ce message ne diminue pas les défis dans enfants "normaux" non plus. Ce message n'affirme pas que mes enfants sont pires que les autres. Ce message n'est pas fait comme si j'étais pire ou meilleure que les autres non plus. J'ai encore moi-même beaucoup à apprendre! **

3 commentaires:

Unknown

Merci...

Tu ne peux même savoir à quel point ton texte tombe bien.

Moi non plus, je ne peux pas tout comprendre ce que tu vis, en tripple... Mais, plusieurs chapitres me parlent et pour les autres, j'ai une vague idée.

Je trouve que tu as un talent fou pour écrire et traduire ta réalité. Ton livre sera certainement très apprécié,
ta fan, Juliex

Chantal

Et que dire la souffrance, de la colère et de la peine d'une maman qui ne peut pas s'appuyer sur son entourage pour être écoutée,entendue comprise et soutenue dans l'acception des différences de son enfant alors que tous connaissent, selon eux bien sûr, quelqu'un qui fait ça aussi et qui n'a rien...À partir de là, devons-nous continuer de parler de nos difficultés particulières avec nos enfants afin de PROUVER, FAIRE COMPRENDRE, ce qu'on dit ou laisser tomber. Moi, j'opte pour laisser tomber, en tout cas pour l'instant...! Et cela, parce que tout ce dont j'aurais besion c'est d'empathie, de compassion.

Annie

Chantal je comprends tellement. Je ne vois pas beaucoup de compassion ou empathie... les gens ne me demandent pas vraiment comme je vais... les gens ne veulent pas vraiment comprendre. J'en ai parlé sur le message "ces clichés qui nous mettent bâtons dans les roues" et c'est pas évident et oui on lâche prise avant de se rendre malade. Je ne l'attends plus la compassion ... je sais que certains l'ont de loin, peut-être que pour l'entourage proche ça fait trop mal? et ce n'est qui écope... on tombe un peu aux oubliettes.

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